Essor de la ville de Conflans (savoie)

Histoire de la Savoie
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MUGNIER74
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Essor de la ville de Conflans (savoie)

Message par MUGNIER74 »

Si la ville de Conflans près d’Albertville est aujourd’hui une des premières destinations touristiques du département de Savoie pour son patrimoine, son histoire est cependant difficile à établir

L’origine de Conflans est assez obscure. Si la table de Peutinger signale une localité nommé « Ad Publicanos » personne ne connaît exactement sa localisation et personne en connaît son rôle.

La ville de Conflans apparaît dans la deuxième partie du moyen-âge comme un castrum et un chef lieu de châtellenie du Comte de Savoie .(1)

Cette ville est évidemment en rapport avec l’ancienne route romaine entre Vienne et Milan qui passe par le col du Petit-Saint-Bernard. Cependant, localement, deux éléments semblent motiver son importance. Le premier est le pont l’Arly. C’est aussi de l’autre côté de ce pont que vont venir s’établir au XII e siècle les chevaliers hospitaliers de Saint Jean de Jérusalem. Ils vont y construire un hôpital qui sera le noyau de la future Albertville.

Le second élément est que Conflans est un territoire limitrophe entre les terres du comte de Savoie qui tient le château de Tournon (2) et les archevêques de Tarentaise qui possèdent la vallée de Conflans à Cevins. Ces derniers en tant que comte de Tarentaise et Prince du Saint-Empire-romain sont suzerains sur ce territoire.

Les comtes de Savoie vont essayer de s’imposer vis à vis de l’archevêque qui tient probablement le principal château-fort de Conflans qui était situé 300 m au dessus du bourg. Il faut peut être penser que les châteaux mentionnés aujourd’hui à Conflans, la tour Sarrasine, la Petite Roche, la Grande Roche, étaient peut être des Maisons-fortes dépendant de ce castrum.

C’est dans le rapport de force avec le Comte de Savoie et profitant de la faiblesse des Vicomte de Briançon que les archevêques construisent le château de la Bâtie-Chantemerle vers 1270, un peu en amont sur l’Isère (3). C’est aussi en 1271, que les Sires de Chevron se révoltèrent contre le comte de Savoie, ce qui nécessita une expédition guerrière .

C’est entre cette date et 1335 que la pression des comtes de Savoie sur les archevêques de Tarentaise sera le plus vive. Elle se fera de plusieurs manières. Par la présence du château de Melphe près de Moûtiers, à Conflans, mais aussi au niveau des alpages en favorisant ses paysans aux détriments de ceux de l’archevêque comme on peut le voir dans la vallée des Encombre sous le comte Thomas 1er. Mais aussi par le passage d’une petite armée dont l’objectif est de réprimer une révolte dans la vallée d’Aoste en 1271 (4). L’élément ultime de cette pression est le siège et la prise de Moutîers en 1335 par le comte de Savoie.

Il semble que ce soit dans ce rapport de force que le comte de Savoie fonde en 1287 la Villeneuve de l’Hôpital-sous-Conflans en face de Conflans (5). Ils y installeront un châtelain. Nous avons des comptes de Châtellenies dès 1305. C’est probablement le renforcement de l’autorité comtale par la mise ne place d’un châtelain qui mis définitivement la famille de Chevron sous l’autorité du comte de Savoie le 6 mars 1306 (6).

En 1319, le comte de Savoie acheta la métralie de Conflans. Il transféra le chef-lieu de la châtellenie à Conflans (7) .

Deux évènements vont probablement favoriser l’essor de Conflans. Le premier, c’est la vente de la châtellenie de Tournon à l’abbé de Saint-Michel-de-la-Cluse en 1333 et le deuxième, c’est la prise de la ville de Moûtiers et la mise au pas de l’archevêque de Tarentaise en 1335.

Évidemment avec cet évènement, la puissance de l’archevêque va être anéantie pour longtemps. Il est probable qu’à cette date, le comte de Savoie prit tous les pouvoirs sur la ville de Conflans. Le passage de la ville de Tournon à l’abbé de la Cluse allait aussi favoriser l’économie de Conflans qui prenait en quelques sortes la succession au rôle de centre économique des terres savoyardes locales qui était jadis dévolue à Tournon (Tournon avait eu un marché dès 1300 et il y avait aussi des banquiers Lombards).

Les comtes de Savoie augmenteront leurs possession dans cette ville avec l’acquisition des Maisons-fortes de la Petites Roche et de la Tour Nasine où logeront les châtelains comtaux (dans un souci de plus grand confort et de plus grande proximité avec le bourg, mais aussi avec la ville de l’Hôpital-sous-Conflans).

Mais Conflans est surtout célèbre pour ses deux bâtiments avec une architecture en brique, la Maison Rouge et le Château Rouge.

La Maison Rouge avait été construit en 1397 par un fonctionnaire du comte de Savoie, Pierre Voisin, dans un but visant à montrer sa réussite sociale (8) .

Contrairement aux nombreux dépliants décrivant cette maison comme « Italienne », il faut rechercher son originalité (qui est son matériaux la brique) plutôt comme une mode dans le comté de Savoie. Si cette Maison dénote, c’est qu’elle est plus ancienne et plus imposante que les autres dans le paysage.

La construction de brique n’est pas une nouveauté dans le comté de Savoie. Elle se remarque à Avigliana et à Bussoleno dans la vallée de Suse, mais aussi en Bresse, dans le Pays de Vaud et dans le Dauphiné voisin.

A Grenoble, la collégiale de Saint André est en brique. A la Côte-Saint-André, la base d’une tour en brique nous indique que le château comtal devait être tout ou en partie en brique.

Dans le Pays de Vaud, ce sont les bâtiments de prestige qui sont en brique ou comporte des éléments en brique comme le château Saint Maire de Lausanne, le château de la Sarraz ou le château de Vufflens près de Morges.

Le château de Vufflens est un bon exemple puisqu’il a été construit aussi par un haut fonctionnaire du duc de Savoie Amédée VIII dans un but aussi ostentatoire.

La construction d’une telle demeure s’explique aussi par le rôle de Conflans comme ville de transit entre le Piémont et la ville de Genève que ce soit par le col du Petit-Saint-Bernard ou le col du Mont-Cenis. La route se poursuivait soit par le Val d’Arly, soit par le col de Tamié et rejoignait Annecy puis Genève.

La ville gardera un rôle de transit lorsque les foires seront déplacée à Lyon dès 1463. Cependant l’axe du col du Petit-Saint-Bernard sera un axe secondaire et les voyageurs passant par le col du Mont-Cenis ne passaient plus par Conflans.

Le déplacement de la capitale du duché de Savoie à Turin allait profiter à Conflans qui était à la fois sur l’ancienne route entre Milan et vienne par le col du Petit Saint Bernard, mais aussi sur la route entre Genève et Turin par le Val d’Arly et la Combe de Savoie. Cette route deviendra encore plus importante avec l’essor de l’économie genevoise au XVIII e siècle et la fondation de la ville de Carouge près de Genève.

Mais ce n’était pas Conflans qui va profiter de cette nouvelle position, mais plutôt l’ancien bourg de Villeneuve-de-l’Hôpital-sous-Conflans. La cause en était le tracé d’une nouvelle route évitant la montée et le passage par cette ville. Cette ville sera même érigée au début du XIX e siècle en chef-lieu d’une nouvelle province administrative et consécration, changera de nom en 1836 en devenant Albertville, la ville du roi Charles-Albert.

Malheureusement en 1860, avec le rattachement de la Savoie à la France et donc le déplacement des centralités géopolitique, la liaison entre Genève et Turin devient donc beaucoup moins importante et la ville perd le rôle qu’elle avait eu. Néanmoins elle réussit quand même à devenir une sous-préfecture en supplantant l’ancienne cité archiépiscopale de Moûtiers.

Elle aura même assez rapidement une gare en devenant le terminus d’une ligne Saint-Pierre-d’Albigny /Alberville de 1876 à 1893, date où la liaison est prolongée jusqu’à Moutiers. Mais la liaison vers Annecy et Genève ne sera jamais une priorité.

texte : Emmanuel Coux - groupe facebook Histoire de la Savoie
https://www.facebook.com/groups/1715708468710072/
photographies : Stéphane Mugnier - page facebook Annecy, la Venise des Alpes
https://www.facebook.com/annecylavenisedesalpes/

Sources :
(1) Joseph Garin, La vie féodale d’une petite ville, Tournon en Savoie, dans , librairie Payet, Albertville, 1938, p. 44
(2) Joseph Garin, La vie féodale d’une petite ville, Tournon en Savoie, Op. Cit. p. 31 ; La première mention des comtes de Savoie à Tournon date de 1210.
(3) Vincent Borrel, Le château de Chantemerle à la Bathie, dans academia.edu ; https://www.academia.edu/5576475/Le_châ ... _la_Bathie ;
(4) Joseph Garin, La vie féodale d’une petite ville, Tournon en Savoie, Op. Cit. p. 41 ;
(5) Ruth Mariotte-Löber, Les chartes de franchises des comtes de Savoie, fin XIIe siècle-1343, éd. Genève, Librairie Droz, 1973, p. 11, p. 141. (Villeneuve ne semblent pas au début rattachée à la châtelleneie de Conflans dont les comptes commencent en 1305).
(6) Joseph Garin, La vie féodale d’une petite ville, Tournon en Savoie, Op. Cit. p. 41 ;
(7)Jean-Pierre Dubourgeat, L’Hôpital-sous-Conflans aux derniers temps des Hospitaliers de Saint-Jean-d-Jérusalem (XVIe XVII e siècles), dans le Discours de réception de M. Jean-Pierre Dubourgeat : h[url]ttps://www.academiesavoie.org/images/discours/ ... urgeat.pdf[/url] ;
(8) http://www.ac-grenoble.fr/savoie/pedago ... _rouge.pdf ;
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Stéphane MUGNIER
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BARRAL
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Re: Essor de la ville de Conflans (savoie)

Message par BARRAL »

merci pour ces informations fort intéressantes.
Bonnes fêtes de fin d'année
Mireille
Mireille BARRAL
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