Puisque je suis aujourd'hui dans le trip "Traditions et spécificités savoyardes", j'aborde le personnage de Michée Chauderon
Car oui, les sorcières de Sologne et du Berry n'étaient pas les seules, la Savoie a eu aussi ses "vedettes" ! Pour en savoir plus sur son parcours et sa vie, voir :https://fr.wikipedia.org/wiki/Mich%C3%A9e_Chauderon
Pour "la romance" voir : https://natureetsorcellerie.fr/ (voir dans "répertoire" en haut à gauche, puis Michée Chauderon, il n'y a pas de lien direct sur la page...)Née en 1602 ou 1603 d'un père prénommé Reymond, à Boëge, dans la région catholique du Faucigny, en Savoie,Michée Chauderon rejoint vers 1620 la protestante Genève pour y travailler comme domestique, dans un mouvement migratoire alors classique.
Michée Chauderon, analphabète, assiste peut-être peu de temps après son arrivée, en 1623, à l'exécution de Jeanne Broilet, la dernière femme brûlée vive pour sorcellerie à Genève, condamnée sur dénonciation de plusieurs femmes ; cela expliquerait sa volonté de « négocier » lors de son propre procès la faveur d'être étranglée avant de connaître le bûcher.
Michée survit aux disettes des années 1622-1623 et 1629-1631, ainsi qu'aux pestes de 1628-1631 et 1636-1640.
Célibataire, elle est bannie de Genève en 1639 pour « paillardise », tout comme son compagnon d'infortune, un ouvrier agricole, le veuf Louis Ducret.
Elle est alors enceinte de cinq mois d'un valet mort quelques mois plus tôt ; l'enfant ne survit pas.
Après s'être marié, le couple revient quelques années plus tard clandestinement à Genève ; en 1646, Louis y est emporté par une épidémie de peste.
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Les archives du procès de Michée Chauderon sont conservées dans un coffre des archives d'État de Genève, avec la procédure contre Michel Servet, car elle est la dernière sorcière condamnée à Genève.
Son procès illustre la fin de la chasse aux sorcières. La grande ordonnance de Louis XIV, en 1682, met fin en France au crime de sorcellerie et le remplace par le crime d'empoisonnement.
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Le 6 avril 1652, Michée Chauderon est la 70e et dernière personne exécutée à Genève pour sorcellerie.
À la fin du XVe siècle, Michée Chauderon correspond à la figure de la sorcière façonnée par la croyance populaire.
C’est une vieille guérisseuse, veuve et célibataire.
Elle possède sans doute un balai pour faire le ménage, vit peut-être avec un chat noir et, pour peu qu’elle ait le nez crochu et un chapeau pointu, le tableau serait parfait.
Quoi qu’il en soit, le 6 avril 1652, la vieille femme est pendue et brûlée en place publique.
Elle sera l’une des dernières victimes de la chasse aux sorcières, qui a compté plus de 100 000 procès en sorcellerie.
Michée est une jeune savoyarde qui s’installe à Genève pour travailler comme domestique.
Libre et indépendante, elle entretient des relations extraconjugales.
C’est un problème.
Elle tombe enceinte, perd l’enfant, est bannie de Genève avec son compagnon d’alors, Louis Ducret, qu’elle épousera par la suite.
Malheureusement, Louis meurt assez rapidement et Michée se retrouve veuve, statut qui entachera d’autant plus sa réputation.
Femme seule, veuve et analphabète, Michée a peu de choix : elle se fait blanchisseuse.
Ce métier la met en relation avec un grand nombre de familles qui profitent de ses talents de guérisseuse.
Malgré sa simplicité, sans ingrédients magiques ou autres jus de pustules batraciens, les potions de la blanchisseuse sont appréciées pour leurs bienfaits.
On y trouve du gros sel, de la farine, du pain, des fèves, autant d’éléments nutritifs que la sagesse populaire juge bons pour la santé.
...Une sorte de soupe d’acides gras omega 3 en somme !
La chute de Michée Chauderon est aussi terrible que typique des procès en sorcellerie.
Alors qu’elle décide de stopper net son activité, sans doute par peur des représailles, les femmes qui venaient la consulter font courir la rumeur selon laquelle la blanchisseuse serait une sorcière qui aurait pactisé avec le diable.
La réputation et le statut social de Michée font le reste. A cinquante ans, considérée comme inutile aux yeux de la société, elle devient un bouc-émissaire.
Résonance contemporaine ;
Détentrice d’un savoir alternatif, Michée Chauderon, à l’instar des herboristes, soignantes, praticiennes, représentait un contre-pouvoir effectif et concurrentiel face à la confiscation académique du savoir par les hommes.
Au fil du temps, après des siècles de haine et d’obscurantisme, s’est opéré un renversement notable de l’image de la sorcière qui témoigne de la place grandissante des femmes dans l’espace social.
Aujourd’hui, la sorcière incarne la femme autonome, émancipée, qui tend à s’affranchir de toutes les dominations.